Retour vers la fin tragique de l'Aéropostale   L'AEROPOSTALE   



Les socialistes battus battent en retraite 1er avril 1931

Battus à la commission chargée d'examiner leur réquisitoire contre M. Flandin, les socialistes battent en retraite. Ils ont senti qu'en continuant leur offensive ils allaient à quelque désastre. Des succès les avaient grisés. Ils occupent tant de postes parlementaires qu'ils se croyaient les  maîtres. Ils menaient le train toutes les discussions; ils régentaient les débats. La faiblesse des modérés, la folie socialisante des bourgeois  radicaux, le penchant avantageux de trop d'élus conservateurs pour des propositions électorales et démagogiques, permettaient au groupe
S. F. I. 0. de prendre figure de vainqueur de demain attendant l'heure du dernier assaut.
̃Il fallait déblayer le terrain de quelques chefs du centre. On inventa contre M. Tardieu l'affaire Oustric. Puis l'affaire de l'Aéropostale sembla bonne à exploiter contre M. Flandin.
La lutte contre les personnes, les accusations à la tribune allaient donner à cette dernière année de législature un aspect révolutionnaire qui  serait d'une bonne préparation aux prochaines vacances de la légalité.
On dit que dans le groupe unifié certains avaient vu le danger de cette politique et tenté de calmer des ardeurs qui leur semblaient de lourdes imprudences. Dans le Parlement des Camarades, on était si tranquille; pourquoi ne pas rester dans les généralités et, sans nommer personne, n'accuser que la société capitaliste, bonne fille sans rancune. Ces prévoyants redoutaient les chocs en retour qui se sont produits. Par crainte cependant de sembler moins purs que les épurateurs, les chefs durent les suivre... L'objectif principal ne fut pas atteint. Et le dépit de cet échec est évident chaque jour à la lecture des questions posées aux témoins de l'enquête par le représentant du parti unifié.
On s'était promis une seconde charrette. Mais la charrette restée vide a reculé sur ceux qui la voulaient charger. Et hier ce sont les socialistes  eux-mêmes qui ont retiré l'affaire Flandin de l'affiche aux scandales. Ils ont abandonné leur proposition de résolution déposée au nom du groupe. Ils ont allégué diverses mauvaises raisons. Mais on en connaît de bonnes. L'hostilité des trois-quarts de la Chambre contre leurs façons et le grondement sourd des militants sévères en leurs désillusions.
Les S.FI.O. du Palais-Bourbon en ont assez. Ils veulent changer d'air. Ils trouvent celui des couloirs empoisonné. On se l'explique. Tandis qu'avec humeur ils renonçaient à l'opération bruyamment montée, il y a cinq jours, on annonçait l'audition prochaine de MM. Peugeot et R. Blum à la commission d'enquête. Et les commissaires adoptaient une résolution destinée à remplacer celle que les socialistes retiraient. Ils réclament au garde des sceaux 'les documents de la Banque Bénard et se plaignent avec vivacité de l'insuffisance des mesures prises pour les conserver.
- Allons aux champs, disent les socialistes, qui sentent bien qu'au Parlement la situation est retournée. Ils ne mènent plus la politique. Les accusateurs sont sur la sellette.
̃Henri Vonoven.

Le retrait de la proposition socialiste
Voici le texte de la motion adoptée par le groupe socialiste S. F. I. 0. du la Chambre, au cours de sa séance d'hier matin.
«Le groupe socialiste, ayant pris connaissance des discussions engagées devant la commission d'enquête au sujet de la Compagnie aéropostale et des collusions révélées dans le cas de M. Flandin, ancien sous-secrétaire d'Etat à l'aéronautique, ministre des finances et avocat de constructeurs d'aviation et de sociétés de transports aériens
» Constatant que, dans ces conditions, la commission d'enquête s'occupe déjà des faits articulés dans la proposition de résolution déposée par le groupe
» Constatant qu'ainsi le but qui était visé par cette procédure parlementaire était dès maintenant atteint
» Constatant qu'ainsi le but qui était visé par cette commissaires ont semblé considérer la proposition de résolution visant M. Flandin comme  un obstacle à ce que la commission d'enquête puisse se saisir directement et complètement des affaires Aéropostale et Flandin
» Décide en conséquence de retirer la proposition de résolution déposée au nom du parti socialiste, se réservant de reprendre ultérieurement  et des la rentrée de la Chambre cette proposition si par hasard les événements ne répondaient pas à son attente.