mis à jour / updated : 07/08/2011 22:22:24
: Friday, July 8th, 2011


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Mars 1927, Pierre-Georges Latécoère vend ses "lignes" à Marcel Bouilloux-Lafont  qui en fera l'AEROPOSTALE 

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André DUBOURDIEU   la sagesse... le texte
Lucien GAMBADE   marche ou crève.... le texte 
Charles CORSIN  Saint Placide pactisant avec le diable    le texte 





Le nom de Dubourdieu est synonyme de sagesse. 7000 heures de vol sans le moindre accident.
La première liaison Toulouse-Dakar. Pilote réceptionnaire.

Né le 13 Novembre 1901 à SAINT-ANDRE-DE-CUBZAC (Gironde), fils de J.L. DUBOURDIEU, Docteur en Médecine.
Après ses études secondaires au Lycée de BORDEAUX et à la Faculté de Droit de cette ville, sert dans l'Aviation Militaire en qualité de pilote (Brevet N° 1029 du 22/11/1921) pendant trois ans.
Engagé aux Lignes Aériennes Latécoère en Août 1924, est affecté sur le tronçon TOULOUSE-CASABLANCA.
Se distingue d'emblée par ses remarquables qualités de fin pilote et par sa maîtrise pour surmonter les difficultés de la ligne dans cette période de début.
- Affecté en 1925 sur le tronçon CASABLANCA - DAKAR, il effectue en compagnie de ses camarades pilotes Léopold GOURP et Jean DENIS, le premier courrier sur DAKAR, au mois de Mai, sur le trajet qui avait été reconnu en 1923 par le Cdt ROIG et les pilotes CUEILLE, Louis DELRIEU et Victor HAMM.
- Affecté en qualité de Chef d'Aéroplace - Pilote à Cap Juby, il effectue de nombreux dépannages dans la zone dissidente du Rio del Oro.
- Revenu à Toulouse en 1930, il remplit, en dehors de ses fonctions de Pilote de Ligne, celle de pilote d'essais de la Société Latécoère qui se consacre uniquement à la construction aéronautique après la cession des Lignes Aériennes à la Compagnie Générale Aéropostale.
- Il participe ainsi à la mise au point du Laté 28 spécial et du Laté 49.
- Ultérieurement, après la création de la Cie AIR-FRANCE, (par fusion ou rachat des Cies pré-existantes) il participe dans le cadre de cette compagnie à la mise au point du COUZINET "ARC-EN-CIEL" de Jean MERMOZ et du COUZINET 10.
- La régularité de ses vols en ligne avait valu à André DUBOURDIEU l'attribution du Prix des Pilotes de Ligne, de jour et de nuit, décerné par le Comité de Propagande aéronautique.
- En 1930, il avait ramené à la France deux records du monde avec le Latécoère 28: vitesse sur 500 et 1.000 kilomètres avec 1.000 kgs de charge.
- Sa licence de pilote n'ayant pas été renouvelée en 1944, pour raison de santé, André DUBOURDIEU, qui était Officier de la Légion d'Honneur, totalisait 11.000 heures de vol et avait parcouru 2.000.000 de kms sans accident. source  





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DUBOURDIEU   HAUT DE PAGE 

Le nom de Dubourdieu est inséparable de ceux de Latécoère et d'Aéropostale.
Il est aussi synonyme de sagesse.
1.150.000 kilomètres parcourus et plus de 7.000 heures de vol effectuées sans le moindre accident, voilà une référence dont pourrait s'enorgueillir à juste titre ce bon serviteur de l'aviation s'il n'était pas si modeste.
Ne à Saint-André-de-Cubzac (Gironde) en 1901, André Dubourdieu trouva sa vocation quand, tout enfant encore, ses parents le conduisirent à l'aérodrome de Beau-Désert où se donnait un grand meeting d'aviation. Coïncidence curieuse: à cette fête assiste également un autre adolescent, Jean Rugammer qui, comme Dubourdieu, s'enthousiasmera tellement au spectacle des Blériot, Latham, Farman et Santos-Dumont voletant dans le ciel bordelais qu'il vouera sa vie à l'aviation et deviendra également un millionnaire du ciel.
De Santos, assis sur une sangle dans le ciel et gauchissant à coups d'épaule les ailes transparentes de sa frêle «Demoiselle», le souvenir vient souvent troubler l'élève Dubourdieu déclinant sans conviction rosa, la rose... Aussi l'heure du service militaire sonne-t-elle pour lui comme une libération et, réalisation déjà partielle de soit rêve, le voici affecté dans l'aviation... mais comme «divers». Qu'importe! l'essentiel n'est-il pas d'y être?
D'ailleurs, trois mois plus tard, ses voeux sont comblés: Dubourdieu est élève pilote. Bientôt breveté, il totalise comme convoyeur, au cours de ses trois années de service, maintes heures de vol précieux entraînement aux grands voyages aériens.

La première liaison Toulouse-Dakar
Rendu à la vie civile, il est agréé, en 1924, comme pilote sur les lignes aériennes Latécoère et s'y fixe à demeure. Un an après son admission. il réussit, à bord d'un Bréguet 14, la première liaison commerciale aller et retour Toulouse-Dakar, au-dessus de régions où la dissidence règne en puissante souveraine, où la moindre panne expose l'équipage aux rigueurs implacables d'une captivité qui parfois ne s'achève que par un lâche assassinat.
C'est surtout dans le secteur saharien du cap Juby, ce morceau d'enfer plané face aux Canaries, que Dubourdieu va s'appliquer à s'adapter aux Maures la crainte salutaire des ailes humaines (?).
En 1930, le Comité français de propagande aéronautique lui décerne l'un des prix des pilotes de lignes récompensant le plus important kilométrage parcouru sans aucun dommage au fret ni aux personnes. Cette année-là, Dubourdieu a totalisé 120.000 kilomètres. En 1932, il sera de nouveau lauréat de cette compétition empreinte, aux yeux des pilotes de lignes, de la plus haute valeur morale  —après que le ruban rouge fût venu, le 14 mars, récompenser cette magnifique carrière.

Pilote réceptionnaire
Pilote réceptionnaire, Dubourdieu témoigne dans cette besogne ingrate et souvent périlleuse de la même conscience que sur la ligne. En 1932, il réceptionne un Laté-49 du programme des R-2, puis, alors que Mermoz est aux prises avec un Bernard de grand raid, il poursuit les essais de l'Arc-en-Ciel Couzinet.
Quelque mois auparavant, il a inscrit son nom au palmarès des records mondiaux. Depuis 1927, en effet, les records de vitesse sur 500 et 1.000 kilomètres avec 2.000 kilos de charge sont l'apanage de l'Allemagne: Steindorff, sur un trimoteur Rohrbach-Roland les a portés respectivement à 215 et 214 kilomètres-heure. Le 26 mars 1931, Dubourdieu se met en piste à Toulouse-Francazal, à bord d'un monomoteur Laté-28 analogue à l'appareil qu'il conduit journellement, sauf la puissance motrice accrue d'une cinquantaine de chevaux. Et celte fois encore, Dubourdieu se dira «assez heureux» à l'atterrissage: à 220 de moyenne, les deux records rentrent en France.
Mais avec une magnifique obstination, il estime qu'on peut mieux encore: il veut surclasser sa performance. Trois jours après, c'est chose faite: le record est porté, sur 500 kilomètres, à 226 et, sur 1.000 kilomètres, à 224. Est-il cette fois pleinement satisfait? Ce n'est pas sûr, tant cet ardent pilote s'attache sans cesse à la recherche de la perfection.
Aussi bien n'allez pas demander à Dubourdieu de vous conter quelque aventure: c'est un mot qu'il a rejeté à jamais de son bagage personnel.
Ecoutez-le sagement philosopher: «Un pilote de l'aviation marchande, vous dira-t-il, doit conduire ses passagers, son courrier, son fret dans les meilleures conditions de sécurité. C'est pourquoi je me suis toujours appliqué à éviter tout sport inutile et à réduire au minimum les chances de coup dur. Je crois y être à peu près parvenu, la veine et moi nous prêtant une aide mutuelle...
Si les meilleurs voyages sont ceux qui n'ont pas d'histoire, n'iriez-vous pas au bout du monde avec un tel pilote?




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Marche ou crève !!! document sonore




     



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  Lucien GAMBADE

Le joli nom — n'est-il pas vrai ? — pour chevaucher les nuages!
Lucien Gambade est le plus jeune des millionnaires du ciel : il n'a que vingt-huit ans.
Son palmarès? 6.225 heures sur les lignes ; le million de kilomètres atteint de 10 mai dernier, sans un seul accident de personnes, chevalier de la Légion d'honneur, deux fois (lauréat du prix des pilotes de lignes, deux médailles d'argent de l'Aéro-Club de France.

Sur la ligne Toulouse-Dakar
C'est à dix-huit ans qu'il prend contact avec l'aviation en s'engageant, à Istres, comme élève pilote. Libéré au bout de trois ans, le voici admis, en 1928, à l'Aéropostale où, pendant trois années il va parcourir, comme son camarade Dubourdieu, l'âpre tronçon céleste Toulouse-Dakar.
Certains jours, brume et vent de sable se liguent contre les énergies humaines et mécaniques conjuguées et lorsqu'on est contraint d'atterrir, c'est souvent à l'aveuglette. A son premier voyage sur ce long secteur de 4.500 kilomètres, Gambade, pris dans un vent de sable, percute plein moteur sur une dune, l'altimètre, déréglé, indiquant encore 400 mètres. Du Latécoère, il ne reste que des allumettes qui heureusement ne flambent pas. Mais, constatation plus grave pour le sort de l'équipage miraculeusement indemne, le bidon contenant la réserve d'eau s'est éventré dans le choc, imité en cela, bien entendu, par le radiateur. En revanche, autre miracle, les lampes du poste radio sont intactes. Mais la batterie, fatiguée, ne peut que recevoir et non émettre.

La soif
L'attente va durer trois jours et trois nuits, sans le secours d'une goutte d'eau pour apaiser le feu qui dévore les gorges... Enfin, au matin du quatrième jour, un avion, conduit par Delpech, repère l'épave et se pose auprès d'elle. O! la vue de cette dame-jeanne remplie d'eau, mais qu'on  leur mesure cruellement au compte-gouttes et qu'ils ne sentent même pas passer dans leur gosier tel un liquide qui se vaporiserait instantanément sur un métal chauffé à blanc... Le récipient est confié à la garde d'un Maure interprète, qui demeure inflexible aux supplications des réchappés. Mais Gambade, né malin, rodant autour de l'avion sauveteur, découvre soudain de précieuses bouteilles: du vin blanc! il en vide une d'un trait et tombe ivre-mort : «La plus belle cuite de ma vie!» conclut-il en riant.

Une aventure chez les Maures
Bien entendu, notre millionnaire a fait connaissance avec les Maures. Le 12 janvier 1931, partant d'Agadir à la tombée de la nuit et après escale à Juby, l'équipage —-Gambade, pilote ; Champlain mécanicien; Riguellc, chef de base à Dakar, passager, el El Boun, interprète maure— doit, après avoir fait route vers l'est pour éviter de se poser en mer, atterrir à bout d'essence, par visibilité nulle, vers 4 heures du matin. On installe l'antenne et l'on transmet un message à Port-Etienne: bref discours avant que la batterie cette fois encore, ne tombe à plat. On a, en revanche, de l'eau et quelques victuailles, mais on n'envoie pas moins un «mois de cauchemar à l'imbécile de pharmacien» qui a eu l'idée de sa composition des boîtes de vivres si peu consistantes qu'on les surnomme couramment: «Perdons du poids.»
Et c'est la longue attente tout le jour alors qu'aux alentours, un avion dépanneur ronronne en vain comme un chat insouciant.
Le lendemain matin, on reprend l'écoute à la radio. Non loin de là, l'interprète El Boun, après avoir observé, une demi-journée durant, la couleur du sable, les traces de végétation et quelques fientes de chameau, pointe son doigt vers l'ouest et déclare péremptoirement: «Cap Lefrech y a par-là, une journée bon chameau.» Ses compagnons se refusent à croire à ce qui est cependant l'exacte vérité.
Vers midi, au moment de se mettre à table, deux silhouettes de Maures apparaissent à l'horizon. En un tournemain, le repas est englouti, afin qu'au moins lui ne tombe pas en dissidence. Sur un feuillet de cahier d'école. Gambade trace ces lignes qui, tout à l'heure, seront peut-être le testament de celte équipe de braves: «Le 13 janvier à midi, nous voyons des Maures à l'horizon. Riguelle appelle son monde à table. Cassons la croûte en attendant les événements. Bon appétit à tous. Le moral est bon.» 
Que va-t-il sortir de la palabre engagée par l'interprète maure, durant laquelle chacun fait, d'un geste rituel, voler le sable en l'air d'un revers de main? Il en sort ceci, de la bouche même d'un des guerriers qui dépose son fusil et s'avance en souriant: «Bonjour monsieur Riguelle, qu'est-ce que tu fais là?» Ceci prononcé en français. Décidément, il n'y a plus de... Sahara!
Quelques heures après, les pilotes Vidal et Delpech ramenaient à tire-d'aile, vers Port-Etienne Gambade et ses compagnons.

Sur la ligne Damas-Saïgon
Depuis lors, Gambade a change de secteur. Et voici bientôt quatre ans que, chaque semaine, il dévide l'écheveau de 9.000 kilomètres qui joint Damas à Saïgon. Dure besogne que celle des équipages sur ce réseau où l'on vole onze heures quotidiennement pendant six jours consécutifs, exposé aux vents de sable du désert syrien, aux brusques changements d'une température qui dépasse parfois 50° à l'ombre, à la mousson indienne, aux traîtrises de la forêt birmane. Mais Gambade encaisse tout avec le sourire depuis qu'il a trouvé son alter ego en la personne du mécanicien Pouliquen, qu'il affectionne mieux qu'un frère: trois ans et demi de voyages en commun sur la ligne, trois mille heures de vol sans la moindre défaillance mécanique ; ce sont là des liens plus forts que ceux du sang.

Chasse au tigre
Mais que de belles «virées» en commun, ou cours de la décade de repos à Saïgon succédant à chaque voyage! Aussi ne vous étonnez pas si je vous conte que Gambade ayant un beau soir, après une longue atttente en «mirador» tué un magnifique tigre. Pouliquen, le lendemain, égalisa le tableau. Et n'allez pas croire, malgré l'accent, que ce soient là des chasses à la Tartarin. car Gambade m'a montré le film immortalisant son exploit cynégétique, unique parmi les millionnaires du ciel.


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   source du 26 juillet 1935       











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CORSIN

Charles Corsin, c'est saint Placide pactisant avec le diable.
Le voici qui descend tranquillement d'un Wibault arrivant de Marseille. La démarche pesante, la «mine fleurie, les yeux finement bridés, il fait songer à quelque futé gentilhomme campagnard. Corsin a trente-huit ans. Il est originaire de Bouvesse-Quiriem (Isère). Il partage avec Burello le titre de premier pilote et celui de recordman absolu: à Burello les kilomètres, à Gorsin. les heures : 9.791 à fin mai. Corsin a toujours aimé le risque, l'aventure. Quand la guerre, éclate, il n'a pas dix-sept ans.
Mais, en décembre 1914, le voici en Belgique, au
158e d'infanterie.
Le 1er mai 1917. il passe dans l'aviation, obtient son brevet sur G.3 à Juvisy, passe à Avord et à Pau et part en novembre à la Spa. 69, en renfort sur le front italien. Il y reste jusqu'en avril 1918, prenant part à maintes opérations.
Il revient ensuite sur le front français, secteur Doullens-Crépy-en-Valois, et à la suite d'une mission à longue distance, ajoute une palme à sa croix de guerre. Une rosette rouge l'accompagne aujourd'hui.
Six mois après l'armistice, Corsin a déjà la nostalgie des ailes. Une mission va partir pour le Pérou. Il s'y engage. Mais, par suite de difficultés de la dernière heure, c'est comme civil et à ses frais qu'il va aller là-bas tenter l'aventure.
A son arrivée, un grave accident vient de se produire. Corsin va prendre la place du pilote disparu. Nos avions, des G. 3, Morane et Salmson, se trouvent en concurrence avec des Avro, des Curtiss, des Caproni. Il s'agit de former des pilotes et de démontrer par des voyages, la valeur des matériels respectifs.
Justement la province de Cero de Pascoa, qui possède une riche mine de cuivre, vient d'acquérir un Salmson que des pilotes américains n'ont pu parvenir à faire décoller, car le terrain est perché à 4.460 mètres d'altitude. Le ministre de la Guerre fait pressentir Corsin, qui accepte d'emblée. Son premier soin est de faire agrandir le champ qu'une ligne de force coupe au beau milieu. Il faudra passer dessous. Corsin s'installe et, au bout de huit cents mètres, arrache le vieux coucou à la limite de la sustentation. Plus tard, il rééditera l'expérience avec un passager. 
C'est dans ces conditions qu'il va accumuler, pendant un an, cinq cents heures de vol, risquant chaque jour sa peau avec le sourire, pour soutenir là-bas le prestige de notre aviation.
Le maître du feu
A peine rentré en France, il est engagé par l'Aéropostale et affecté au secteur Toulouse-Malaga. C'est alors que commence cette étonnante carrière de «lignard» où il va se jouer comme par miracle des pires coups durs. Car Corsin a eu trois fois le feu à bord, trois fois il a ramené l'avion correctement ou sol.
La première fois, c'est en 1922, sur le terrain de Barcelone, ancienne rizière  périodiquement inondée. Il pleut dans le bessonneau comme il pleut sur la ville... Et Corsin, qui vient d'atterrir en Bréguet-14, recommande a son petit mécano espagnol de bien couvrir les magnétos avec des chiffons. Le lendemain, départ. Le ciel s'est rasséréné. On fait un long point fixe, volets fermés, pour bien chauffer le moulin. Voici le thermomètre à 70°.
-Ça va! enlevez les cales! Le Bréguet décolle. 
Il n'a pas fait un kilomètre qu'un feu de forge ronfle sous le capot. Dans son ardeur professionnelle, l'arpète y avait emmagasiné tout ce qu'il avait pu dénicher en fait de vieilles loques et avait seulement omis de les enlever au départ. Corsin songe à ses deux passagers plus qu'à lui-même. Pourtant sa combinaison commence à grésiller... Un renversement fou, un atterrissage plein travers, mais sur les roues. Et l'on en est quitte pour la peur. Car on peut être brave et avoir peur.
L'Aéro-Club lui décerne sa grande médaille de vermeil.
Le 17 janvier 1931, Corsin remonte de Lyon au Bourget à bord d'une berline Bréguet transportant six passagers. Le sol est couvert de neige, rendant malaisée la navigation observée. L'atmosphère est d'un jaune sale, la visibilité précaire. Les plans, de surcroît, menacent de givrer. Ah! voici le canal de Bourgogne, bon repère; à tribord, la masse sombre de la forêt d'Othe; droit devant: Sens. Près de lui, tle radio Duclot suspend ses manipulations:  "Bientôt le Bourget, vieux frère!». 
Boum ! Une détonation sourde a ébranlé la berline. A travers l'huile brûlante qui l'aveugle, Corsin a discerné un éclat rouge. Vite un champ... mais  encore pas n'importe lequel. Si l'on capote ou si l'on se met seulement en pylône, on est perdu. Ah! celui-ci, bien qu'il soit détrempé, il sait qu'il pourra s'y poser correctement. La prévision est exacte; les occupants sont saufs.
Jamais deux sans trois... Un an plus tard, en février, à bord d'un Lioré, en compagnie du mécanicien Olier, Corsin conduit à Londres trois Anglais, dont une passagère, A cent cinquante mètres de haut, une rupture de bielle éventre le moteur tribord, coupe les pompes d'alimentation d'essence par où le carburant coule à flots, embrasant le plan droit. Providentiellement, le vent souffle par bâbord et ne rabat pas les flammes sur la cabine. La structure métallique résiste suffisamment au feu pour que, toujours après avoir choisi son champ, Corsin puisse, sautant de justesse un silo, poser bien droit l'avion sinistré.
Depuis lors, chaque année, en février, Corsin reçoit de sa passagère quelques lignes en souvenir.
Et cela, c'est pour Corsin la plus belle des récompenses.
Mai son secret, me direz-vous?
Le champ de luzerne, tout simplement.
Vous n'y capoterez jamais, si vous n'êtes pas un «patouillard».
Corsin a payé largement son tribut à la malchance. Depuis ce dernier coup dur, il a parcouru 250.000 kilomètres en 1.400 heures de vol sans qu'aucun voyage ait été arrêté ni par le temps ni par le moindre incident mécanique.
—- Question de chance !... dit-il simplement.
Celle chance, Corsin, ne l'avez-vous pas patiemment façonnée par votre abnégation?









Le 11 septembre 1914, à l’age de 17 ans, Charles Corsin s’engage au 99ème régiment d’infanterie. Blessé par deux fois et cité sur le front de l’Iser et de l’Artois, il est ensuite breveté pilote militaire le 30 septembre 1917 (sous le n° 9070 à Juvisy). Il participe à plusieurs combats aériens qui lui valent une citation à l’ordre de la 10ème armée et la croix de guerre. Devenu pilote de ligne le 6 juin 1921 (chez Latécoère puis à Air France en 1933) il totalisera plus de 18000 heures de vol (dont 643 heures en temps de guerre) et détiendra de nombreux records aéronautiques. Durant la deuxième guerre mondiale, il assurera la liaison entre la France et l’Indochine. Redevenu pilote civil après la guerre, puis chef d’escale et enfin inspecteur de première classe à Air France, il se retirera à Mougins en 1952 dans le sud-est de la France. SOURCE 
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